L’époque des radios libres

En ces temps de parole contrôlée par un politiquement correct qui flingue tous azimuts,  et malgré les apparences, toute tentative d’expérimentation, il est bon de se souvenir qu’il y eut les années 70 et les années 80. Les années 80 permirent l’ouverture sauvage (en mai 1981, après les présidentielles) puis légale (loi du 9 novembre 1981 qui permet d’avoir des « dérogations » au monopole et des attributions de fréquence « officielle ») des ondes radiophoniques.

 

L’expérience fut en réalité de courte durée. La publicité qui amène l’argent exerçant ainsi le meilleur des contrôles (on vient de le constater avec l’épisode récent qui a vu le journal Libération afficher une Une qu’on peut critiquer pour plein de raisons à commencer que le contenu du journal n’a plus rien à voir avec l’esprit provocateur de la Une en question. Cette Une taclait la demande de nationalité belge du plus riche des patrons français. Suite à ça, le journal a vu se désister un certain nombre de campagnes de publicité, de maisons de luxe notamment. Le paradoxe de ce journal qui se voudrait encore « de gauche » et qui se fait financer par des marques que son lectorat n’a, on pourrait du moins le supposer, pas les moyens de se payer, ce paradoxe n’est qu’apparent. Libération est la caution de gauche de gens qui ont les moyens de ne plus l’être. Passons sur cet aparté… D’autres blogs en ont parlé bien mieux que moi, notamment Heaven can wait), la publicité donc, qui amène l’argent exerçant ainsi le meilleur des contrôles, devint une obligation pour passer de l’amateurisme des animateurs et des matériels au professionnalisme. Les radios libres devinrent des radios commerciales, dotées d’émetteurs hyper-puissants qui écrasaient toutes celles qui n’avaient pas les moyens de s’équiper. La parole libérée, sinon libre, repartit d’où elle était venue dans les marges.
Certes tout n’était pas bon à prendre,

à écouter dans ces « radios libres ». Beaucoup de verbiage. Beaucoup d’émissions mal préparées. On en sait quelque chose. Cette Nifty Fifty qui vous écrit a parlé dans le poste (sur Ark en Ciel et Fréquence Gaie qui partagaient la même fréquence) pendant 4 ans à peu près : émissions du petit matin, émissions du soir avec auditeurs à l’antenne, émissions de la nuit, émissions à invités (artistes, écrivains) émissions savantes ou émissions étonnantes (le tirage de cartes en direct), la dame qui vous écrit a fait et vu pas mal de choses et de gens (ainsi Yves Mourousi alors en pleine gloire télévisuelle, mais pas le Mourousi du journal de 13h, un Mourousi en jean déchiré, blouson de cuir, chien en laisse et minets aux basques, interviewé Patrick Bruel qui chantait « marre de cette nana-là », Elisabeth Depardieu, Hippolyte Girardot…) dans les studios et dans les fêtes.

Se souvenir de cette période, c’est aussi se souvenir de Supernana (6 février 1954-14 septembre 2007) qui officiait sur Carbone 14. Carbone 14, sur 97.2 a perdu sa fréquence au profit de Fréquence Gaie en août 1983 et c’est comme ça qu’on a croisé Supernana entre deux émissions.

Plutôt petite et grosse, grande gueule, Supernana, arrivée aux débuts de Carbone 14, y était la seule femme. C’était une star des radios libres.

Sa voix devait porter et la femme devait s’affirmer dans ce milieu masculin qui avait emprunté à Hara-Kiri  la tendance  cul et vulgarité qui était la particularité de cette radio où Jean-Yves Lafesse a fait ses débuts. Les moyens de ces radios étaient modestes et souvent les animateurs faisaient également la « technique » de leurs émissions : lancement des jingles, des disques, etc.

Après la disparition de Carbone 14, et quelques années plus tard, Supernana a officié sur Skyrock, gardant le ton grossier, violent, agressif qui était sa signature. Là encore, les contraintes publicitaires auront raison des émissions qu’elle anime.

On peut aussi se souvenir d’une autre super nana, à la beauté renversante et à la liberté sexuelle étonnante si on en croit certains articles et biographes (Wendy Leigh en 2008)  : Grace Kelly, morte un 14 septembre.