Se souvenir de qui n’est plus fait entrer dans le présent un passé qui nous a apporté des émotions. Louise Brooks, l’actrice, Christine Pascal, l’actrice devenue réalisatrice et Colette, l’auteure, qui prennent part à ce Memento d’août ont compté pour leurs contemporains et comptent encore aujourd’hui. Elles ont toutes connu le succès et les échecs, les dépressions. Leurs vies  ont été  libres, hors des rails. Le prix en a été payé.

Colette*, auteure française, est morte le 3 août 1954 à 81 ans et eut l’honneur de funérailles nationales ce qui lui aurait certainement beaucoup plu. Ecrivain de réputation mondiale, elle garda toute sa vie un très fort accent bourguignon, roulant les r, accent qu’on entend dans cette émission enregistrée en 1950 (ici et ici), et des manières rustiques avec lesquelles elle se plaisait à choquer les relations aristocratiques de Henry de Jouvenel, son deuxième mari et d’une manière générale ses admirateurs. Elle adorait manger de l’ail*, ne portait pas une attention très forte à l’hygiène corporelle et après avoir eu un accident de vélo,  ne se promenait plus que pieds nus dans des sandales, chose impensable pour une femme de sa réputation et de son milieu. A l’âge de 62 ans elle fit une tournée à succès aux Etats-Unis, son seul voyage dans ce pays, en 1935. Ses hôtes furent fort supris de voir arriver cette grosse petite dame, se déplaçant difficilement, chaussée de sandales et qui était loin de la « French Touch » élégante qu’ils s’attendaient à voir…. Colette a toujours su mener de front sa vie et les scandales qui y ont été associés.

Après son mariage

 

avec le journaliste Willy qui la déguisa longtemps en petite fille, elle eut une longue relation avec Mathilde de Mornay, dite Missy, toujours habillée en homme.

Sur cette photo, juste derrière elle, on trouve son jeune beau-fils, Bertrand de Jouvenel. Lors de ce séjour breton en 1920, Colette décida que Bertrand, âgé de 17 ans, garçon plutôt timide, devait découvrir sa sexualité. Il passa une nuit avec Hélène Picard, puis avec Germaine Beaumont, avant d’entamer avec sa belle-mère une longue relation malgré l’écart d’âge de 30 ans (nous en reparlerons de cette histoire). Toute la vie de Colette est plus dense et plus riche en rebondissements qu’un roman de Ponson du Terrail : amoureuse aux amours multiples, amie fidèle, épouse, écrivain, journaliste , actrice, cuisinière gourmande, créatrice de cosmétiques (elle a ouvert un magasin mais l’aventure ne dura pas très longtemps malgré le soutien de ses amies et de sa fille) et mère de famille (même si ça n’a pas été son rôle préféré).

* Dans ses années Saint-Tropez (1926-1938) qui succédèrent aux années bretonnes, sous l’influence de celui qui serait son troisième mari, Maurice Goudeket (qui avait 17 ans de moins qu’elle), Colette acheta une propriété de deux hectares, « La Treille Muscate ». Là-bas, elle y jardinait, cultivait ses légumes, cuisinait des poissons et mangeait de l’ail à longueur de journée, même au cabaret du port où « on lui en apporte en chapelets. Elle y mord de toutes ses dents et fourre le reste dans sa poche pour la route ». Elle reconnaissait elle-même sentir « l’ail d’une manière homicide ». Cité dans le très beau livre de Marie-Christine et Didier Clément « Colette gourmande », paru en 1990 chez Albin-Michel.

De Colette, « Chéri », « la fin de Chéri », « le Pur et l’impur » doivent être lus et relus.