Si, comme 1,5 millions de téléspectateurs, vous avez aimé Carla Bruni dans « une campagne intime » (réalisé par Farida Khelfa et diffusé sur Direct 8 mardi 5 novembre), vous aimerez peut-être « Un château en Italie » réalisé par sa sœur Valeria Bruni-Tesdeschi.


C’est le film de la fin d’une époque, la fin d’une enfance riche et insouciante en Italie du Nord, un film sur les désillusions et les traquenards de la vie, sur la mort des uns et la vieillesse des autres.
L’héroïne, Louise Rossi-Levi, n’a pas de sœur dans le film mais une mère, jouée par la propre mère de Carla et Valeria, Marisa Borini, 83 ans, qui a joué dans tous les films de sa fille aînée.
Louise Rossi-Levi, actrice qui a quitté le cinéma pour « donner de la place à la vie », partage sa vie entre son frère, Ludovic (Filippo Timi) malade du sida et dont l’état de santé se dégrade à grande vitesse, les débats autour du sort à donner au patrimoine familial (le fameux « château en Italie », les tableaux de maître et son désir frénétique d’avoir un enfant du jeune Nathan (Louis Garrel).

Filippo Timi (Ludovic, le frère), Valeria Bruni-Tedeschi (Louise Rossi-Levi), Louis Garrel (Nathan, le jeune amant)

C’est un film qui ne manque pas

de charme – la beauté de la langue italienne y est pour beaucoup-, ni d’humour. Valeria Bruni-Tesdeschi a un sens assez cocasse, assez keatonien (de Buster Keaton) pourrait-on dire, des postures physiques de ses personnages. Beaucoup de scènes sont drôles, à la limite de l’absurde et de l’émouvant : la rencontre dans les bois de Louise et Nathan, Nathan passant chez son père, cinéaste (André Wilms, touchant) pour découvrir que Louise y a oublié une écharpe, le passage de Louise et Nathan, à la clinique pour préparer une fécondation in-vitro, le pélerinage de Louise en Italie pour aller s’asseoir sur le fauteuil magique qui rend toutes les femmes fécondes, le moment où elle s’asperge le ventre d’eau bénite…. La mort, l’argent, la religion, l’amour, tout se mêle en une comédie burlesque et mélancolique, ce qui est finalement le portrait de Valeria Bruni-Tesdeschi, qui aime mêler romanesque et drôlerie.
Valéria Bruni-Tesdeschi est d’une féminité délicate et énergique, avec ses petites robes fleuries décolletées, ses mules qui claquent sur le pavé italien, sa voix à la fois éraillée et haut perchée , même si la couleur châtain qu’elle a adoptée pour le film lui va moins bien que son blond habituel.

Filippo Timi qui joue Ludovic, le frère, est d’une beauté maladive qui va avec le rôle, Céline Sallette joue Jeanne, la femme qu’il épouse peu avant sa mort et Louis Garrel est ténébreux comme à son habitude. Omar Sharif, oui, Omar Sharif (le nom ne dira rien aux plus jeunes, il a joué il y a des années dans « Lawrence d’Arabie », « Le Docteur Jivago », « Les cavaliers », « Funny Girl »), qui ne fait pas ses 81 ans, fait une apparition amicale. Xavier Beauvois (réalisateur du film « Des hommes et des dieux ») a pris un coup de vieux et 15 kilos, ce qui le rend parfait en ex-ami de la famille, parasité éconduit par ces gens capricieux et radins.

Valeria a beau dire que ce n’est pas un film autobiographique, ça y ressemble beaucoup. Le fameux château est l’ancienne propriété de la famille. Virginio, le frère de Valeria et Carla, est mort du sida en 2006. Louis Garrel, 30 ans, vécut plusieurs années avec Valeria, 48 ans, et adopta avec elle une petite fille avant leur séparation.
Dans le film, Louise/Valeria lui dit : « je veux trouver l’amour. Je veux des enfants à la folie ». Nathan/Louis lui répond : « Je veux juste m’amuser ». On ne peut pas s’empêcher de penser que leur relation s’est heurtée à ces volontés contradictoires. Malgré leur séparation, Valeria tourne avec Louis. Regardez-les, côte à côte sur leur banc, en tournée de promotion pour le film à Rome, ne sont-ils pas mignons?

Valeria Bruni-Tedeschi et Louis Garrel, Rome, octobre 2013

Marisa Borini, avant d’épouser un riche industriel, fut une pianiste concertiste. En 1996, Carla a appris qu’elle n’était pas la fille du mari de sa mère mais d’un jeune guitariste. Carla Bruni tire de sa mère ses yeux bleus pâles en amande et ses pommettes saillantes, et sans doute le nez avant qu’elle le fasse refaire (la seule opération de chirurgie esthétique qu’elle ait avoué).

Carla Bruni. Marisa Borini, sa mère

Pour en savoir plus sur la saga des Bruni-Tesdeschi, notamment la conversion, évoquée dans le film, de la famille à la religion catholique et leurs collections d’art, lire ici.