Aux urnes (vieux) citoyens!

Je l’avoue : j’aime voter. Ca vient de loin quand j’accompagnais ma mère au bureau de vote. Endroit très mystérieux pour  un enfant : ces petits papiers qu’on prend à une table avec des gens assis derrière qui vous sourient, cette cabine avec des rideaux gris comme les Photomaton et qui n’allaient pas jusqu’au sol, le nom dit à haute voix de manière incompréhensible (car ce n’était ni Martin, ni Dupont et je m’étonnais que ma mère se reconnaisse)…

En cette période d’élections essentielles, une population est totalement oubliée des appels à voter: les vieux, particulièrement ceux qui vivent dans des maisons de retraite. Ma vieille (88 ans dans un mois) mère appartenant à cette catégorie, je me suis préoccupée de la question et lui ai proposé de voter pour elle par procuration.

L’établissement où elle est s’est occupé avec célérité des démarches nécessaires et un matin je reçois un coup de fil de la dame qui gère son dossier et qui me passe le représentant officiel de la loi  qui avait fait le déplacement. « Votre maman ne sait pas trop où elle en est, elle ne comprend pas ce qu’on lui dit. Elle n’arrive pas à me donner sa date de naissance », me dit une jeune gardienne de la paix. Je m’étonne un peu car j’avais parlé politique avec elle la semaine précédente et je lui avais apporté tous les programmes distribués sur les marchés. Je dicte les renseignements demandés par téléphone.

« Demain c’est les élections », me dit ma mère le samedi suivant alors que d’habitude elle ne sait pas trop quel mois on est (dans ces maisons, le temps est immuable). Oui! Voter est bon pour le cerveau.

Les maisons de retraite font appel à des animateurs pour des petits concerts, des spectacles de danse, des bals même. Pourquoi ne pas faire venir des associations qui parleraient des élections, des différents programmes, des candidats? Et même installer des bureaux de vote dans les halls de ces maisons. Ou faire appel à des bénévoles pour les pousser en fauteuil jusqu’au bureau le plus proche. Les vieux dans les maisons de retraite sont bien moins déconnectés de la réalité qu’on le pense, c’est juste qu’ils n’ont plus les moyens d’accéder à l’information. Une mauvaise vue ne permet pas de regarder la télévision ou de lire le journal, une ouïe partie en sucette empêche d’écouter la radio, les enfants ne sont pas beaucoup là. Mais l’intérêt pour la société lui est toujours là et il ne faut pas grand chose pour le réveiller.